L’arrivée d’Internet dans nos vies
quotidiennes habitue nos enfants à la satisfaction instantanée de toutes
leurs envies. Au point que le moindre délai devient intolérable.
Dans ce climat d’hyperconsommation et
d’immédiateté, l’un des grands défis éducatifs est bien d’apprendre à
nos chers petits à gérer le sentiment de frustration. Désirer, attendre,
savoir différer le plaisir en acceptant la notion d’étape, voilà un
atout majeur pour qu’ils soient heureux dans la vie. Avoir grandi dans
une famille où l’on a cultivé le goût de l’attente est une chance. Pas
facile pourtant : forfaits illimités, e-commerce, accès toujours plus
précoce aux nouvelles technologies, tout joue contre les efforts des
parents à transmettre la vertu de la patience qui est, pour les
philosophes, non pas un but en soi, mais une voie de sagesse, un chemin
spirituel.
Les
quatre semaines de l’Avent sont une période privilégiée pour
expérimenter en famille, sans grand discours, le plaisir d’une attente
riche de la promesse qu’elle contient. Bien plus que dans le jour même
du 25 décembre, le mystère de la joie de Noël n’est-il pas entièrement
contenu dans le temps qui le précède ? Cette fête dont le paroxysme a
lieu dans le silence d’une nuit toujours étoilée est avant tout celle de
l’espérance, du latin sperare, attendre. Et c’est justement ce qui est
le plus excitant : décorer, inviter, cuisiner, trouver, emballer,
imaginer la joie de ceux qu’on aime, anticiper le plaisir des
retrouvailles. On peut facilement mettre en valeur l’aspect positif du
délai, du désir qui monte jusqu’à la nuit merveilleuse, en s’appuyant
sur les nombreux rituels qui jalonnent le mois de décembre.
« Noël est une fête puissante pour les
enfants, souligne pour sa part Lise Bartoli, psychologue clinicienne,
auteur de l’Art d’apaiser son enfant (Payot, 2010). Ils perçoivent chez
leurs parents un afflux d’émotion qui les touche beaucoup. Généralement,
ce sont des émotions positives, une joie très simple qui se partage à
travers les rituels familiaux de préparation. Ces objets qu’on ressort
chaque année des cartons, ces odeurs de clémentine et de sapin sont des
supports pour magnifier l’attente. Cette fête précède le début d’une
nouvelle année et marque une naissance. Elle porte une dimension de
“passage”, avec ce que cela constitue de temps fort de la vie. »
C’est aussi l’avis de la psychanalyste Catherine Ternynck. « Cette
ponctuation des jours par des rituels permet de retrouver une scansion
du temps qui est en train de disparaître complètement avec la
banalisation commerciale du dimanche. L’Avent est l’un des rares moments
de l’année où l’on se prépare à quelque chose qui nous dépasse, nous
ouvre à la grâce, à l’émerveillement, à la gratitude. »
Pour les adultes, s’investir dans ce
partage du temps familial suppose de ralentir, de se poser pour savourer
aussi cette préparation. « Si nos enfants ont un rapport problématique
au temps, c’est aussi parce que courir est de rigueur aujourd’hui,
rappelle Catherine Ternynck. Nous vivons dans la précipitation. » Du
coup, dire à son enfant : « Pas maintenant », « Plus tard » face à une
demande de portable, une demande de sortie, ou une barre chocolatée
avant le dîner réclame conviction et confiance en soi. « La mission des
parents est précisément de résister à la facilité d’aller au plus court.
Le désir se nourrit de l’attente, encore faut-il avoir appris à la
supporter et mieux encore à la goûter. »...
Chaque soir, une petite activité à réaliser avec ses enfants, et un bon moyen de s'imprégner de l'esprit de Noël.
Source : La Vie
Illustration : Darkmello
dimanche 1 décembre 2013
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